Une Dream Team. Pas moyen de qualifier ça autrement ! Quand vous prenez Ryôichi Ikegami (Crying Freeman, Mai the Psychic Girl) et que vous lui adjoignez Shô Fumimura, dont le pseudo Buronson vous est sans doute plus connu puisque scénariste de Ken le survivant, moi j’appelle ça une Dream Team.
Sanctuary narre les aventures de deux jeunes hommes, Hôjô et Asami, quasiment frères de sang. Ils ont un but, lié à un passé commun douloureux : faire du Japon leur « sanctuaire », un endroit où ils pourraient être enfin chez eux. Si ça ce n’est pas de l’ambition !!
Pour ce faire, Hôjô va choisir la voie du Yakuza, tandis qu’Asami se lance dans la politique. Le challenge : arriver le plus vite possible en haut de l’échelle et pour cela, tous les moyens sont bons : chantages, viols, meurtres, manipulations…
Disons-le tout de suite : Sanctuary est un manga « adulte ». Oui, c’est violent, parfois érotique, mais c’est adulte aussi parce qu’on se prend une bonne grosse leçon de réalisme sur l’ambiance politico-sociale de l’archipel nippon.
En fait, si Sanctuary est une réussite incontestable sur le plan de la narration, elle l’est aussi sur celui du contenu. Y sont dénoncés tous les travers d’une société bien plus malade que ses dehors policés pourraient le laisser penser. La collusion mafia-monde politique, secret de polichinelle pour les nippons mais que les européens ne connaissent sans doute pas assez, la rigidité d’une société ultra-hiérarchique où les « vieux » accaparent tous les postes et s’y accrochent, ne laissant aucune chance aux jeunes, la prostitution étrangère, etc…
Du coup, la réaction de Hôjô et d’Asami est à la mesure de la déliquescence de la société : tous les coups sont permis !! Hôjô veut rapidement devenir boss de tous les yakuza du pays, mais il devra aussi compter avec les mafias chinoise et russe. Asami entre au service de l’éminence grise du gouvernement, l’homme qui tire les ficelles dans l’ombre… et va tout faire pour l’assassiner politiquement.
Alors oui, Sanctuary est une histoire de « salauds magnifiques », ambiance John Woo, où on ne peut pas détester les héros pour leurs actions, car le monde où ils évoluent ne leur laisse pas le choix. Hôjô et Asami sont des anti-héros et les deux auteurs les assument très bien.
Car oui, Ikegami et Fumimura sont à la hauteur de leurs ambitions sur ce manga : le scénario est en béton, les personnages convaincants et pas monolithiques, le dessin confine au génie, le découpage tient en haleine le lecteur jusqu’à l’ultime page de l’ultime volume.
Les seuls problèmes de ce manga ? Peut-être un regard un peu trop tendre sur les agissements de Hôjô et d’Asami… mais après tout, c’est aussi pour ça qu’on aime les films de John Woo, hein ! Le second problème est matériel : l’éditeur, Kabuto, n’existe plus depuis 2008 et du coup, il peut être un peu difficile à trouver dans son intégralité.
Mais si vous le trouvez et que vous aimez les polars politico-mafieux, jetez-vous dessus, vous ne le regretterez pas !